LINGUIST List 36.2471
Fri Aug 22 2025
Confs: Représenter l'écriture. Outils, techniques, exploitations. (Canada)
Editor for this issue: Valeriia Vyshnevetska <valeriialinguistlist.org>
Date: 21-Aug-2025
From: Foucambert, Denis <foucambert.denisuqam.ca>
Subject: Représenter l'écriture. Outils, techniques, exploitations.
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Représenter l'écriture. Outils, techniques, exploitations.
Date: 17-Oct-2025 - 17-Oct-2025
Location: Montréal, Canada
Linguistic Field(s): Cognitive Science; Ling & Literature; Psycholinguistics; Text/Corpus Linguistics
Submission Deadline: 15-Sep-2025
Représenter l’écriture. Outils, techniques, exploitations.
Journée d’études internationale co-financée par les universités de
UQAM (Canada), HEC Montréal (Canada), Bordeaux (France), Turku (Finlande), Vendredi 17 octobre 2025 - Montréal (Canada)
Lieu : Université du Québec à Montréal (UQAM) - Salle DR 200 / 10h00-16h00
Dans le champ des études sur l’écriture, on observe depuis un demi-siècle un déplacement de l’intérêt des chercheurs du produit (l’écrit terminé) vers le processus (le trajet de sa production). Du point de vue des théories du texte et du discours, ce déplacement s’est concrétisé par le développement, aux confins de la littérature et des sciences du langage, de la génétique textuelle, discipline ancrée dans la philologie mais qui s’en distingue précisément par sa focalisation sur le trajet, le cheminement, l’élaboration à et par l’écrit d’un objet qui deviendra un texte mais qui, au cours de son élaboration, intéresse en premier lieu comme en devenir. Née dans les années 1970 en France, la génétique textuelle, représentée par l’Institut des Textes et Manuscrits Modernes (item.ens.fr), mais aussi plus récemment par le Centre for Manuscript Genetics (https://www.uantwerpen.be/en/research- groups/centre-for-manuscript-genetics/) s’est concentrée sur les manuscrits autographes d’œuvres produites le plus souvent à partir du XIX° siècle, pour tenter, à partir des indices matériels des manuscrits, d’en reconstituer chronologiquement le processus d’invention (Grésillon 1994). Au plan méthodologique, un des aspects les plus féconds de la génétique textuelle est la réflexion sur les différents modèles de transcription (à différencier des notions de représentation et des visualisation) des manuscrits, avec en parallèle :
- la transcription diplomatique, héritée de la philologie, qui présente le manuscrit au plus près de sa réalité topographique ;
- la transcription linéaire, qui présente les opérations d’écriture dans l’ordre dans lequel elles semblent avoir été produites ;
- la transcription chronologique, qui rend compte des strates rédactionnelles organisant l’écriture (Lebrave, 1990).
Ces trois types de transcriptions peuvent se lire comme trois tentatives de représenter la genèse d’un texte, organisées de la moins interprétative (la diplomatique) à la plus interprétative (la chronologique), privilégiant la topographie de la page pour la première, la succession chronologique des opérations pour la deuxième, entrant dans une analyse macrostructurelle de l’écriture pour la troisième.
Sur la base de ces travaux se sont développés dans les années 1990 des outils d’enregistrement de l’écriture (en anglais Keystroke logging) : sur traitement de texte, avec le logiciel princeps Genèse du texte développé dès 1992 par l’Association Française pour la Lecture (AFL, 1992) ; de manière manuscrite, avec le développement des tablettes graphiques. Ces outils et leurs successeurs ont considérablement fait évoluer la question de la représentation de l’écriture. Au contraire de la recherche sur des manuscrits papier, où un des enjeux est de reconstituer la chronologie des opérations scripturales, les logiciels dédiés livrent cette chronologie. La question n’est plus alors de savoir comment y accéder mais plutôt quel sens donner à ces milliers de micro-opérations portant sur des graphèmes constitutifs de mots, de syntagmes, de phrases, enregistrées par les logiciels et restituées en temps réel, comme dans un film dont l’héroïne serait l’écriture elle-même. Que peut traiter la génétique quand on lui sert sur un plateau des données qu’elle passe d’ordinaire un long temps à construire ? Quelles représentations donner de l’écriture enregistrée au moment même de son déroulement, restituée comme un film, tout à la fois dans le temps et l’espace, mais qu’il importe de stabiliser à l’écrit pour pouvoir en étudier les modalités ?
Différents chercheurs ont proposé, notamment dans leurs thèses de doctorat, des types de représentation de ces écritures in vivo :
- Py Kollberg (1998) inaugure une nouvelle façon de montrer le processus d’écriture qui devient un objet visuel.
- Claire Doquet (2003) choisit de privilégier la séquentialité des opérations, délimitées par (1) les pauses d’écriture et (2) le changement d’opérations (ajout versus suppression par exemple), en listant chronologiquement les opérations et en insérant périodiquement des états intermédiaires du texte.
- Christophe Leblay (2011) propose, dans la continuité de la S-notation de Kollberg (1998) une représentation qui ressemble davantage au texte, avec des balises signalant les opérations d’écriture en donnant à voir des patterns colorés.
- Leijten & Van Waes (2013) introduisent explicitement la notion de visualisation appliquée aux processus d’écriture.
La représentation proposée par Doquet rend saillante la temporalité de l’écriture, avec les opérations d’écriture et les pauses, au risque de flouter la linéarité du texte, donc sa compréhension ; celle proposée par Leblay s’appuie sur le texte, au risque de rendre plus difficile la perception du cheminement de l’écriture. Suite aux travaux de Lindgren & Sullivan (2002), poursuivant ce qui est nommé LS graph, une troisième voie a été explorée par Christophe Leblay et Gilles Caporossi, consistant à représenter l’écriture de manière spatiale et temporelle, par un système d’ordinaire dévolu aux mathématiques (graphes et réseaux). Cette voie très innovante a ouvert la voie à diverses thèses qui sont, pour nous en tenir aux dernières années, celles de Bécotte-Boutin (2019), de Zhong (2020) et celle de Tanoï Namoi (2025). Ont suivi d’autres thèses (Conijn, 2020; Bekius, 2023; Butzek, 2023; Buschenhenke, 2025), qui ont permis progressivement de préciser un cadre théorique et une méthodologie de l’écriture enregistrée (dite parfois en temps réel). Se posent alors les questions de la lisibilité et de la pertinence de ces représentations au-delà de la communauté des chercheurs, notamment pour des enseignants dont l’expertise est souvent plus axée sur les écrits que sur l’écriture elle-même. Donner des représentations claires et heuristiques de l’activité d’écriture permettrait sans doute d’en consolider la compréhension.
Les représentations de l'écriture reflètent pour partie les processus cognitifs qui sous-tendent la production écrite. Elles peuvent nous servir à comprendre plus finement différentes facettes du langage par l’étude des processus de production de personnes atteintes de différents troubles mais aussi par l’observation et l’analyse de production dans un contexte particulier, comme celui, par exemple, de l’écriture de textes prenant en charge l’inclusivité dans la langue.
Nous proposons ainsi une journée de réflexion sur les représentations de l’écriture à partir de son enregistrement. Les propositions pourront s’articuler, de manière indicative et non limitative, autour des divers axes évoqués dans cet appel, notamment :
- Les outils disponibles pour la recherche ou l’enregistrement. Ces outils numériques présentent différentes options pour représenter l’écriture. Les questions peuvent alors être : Pourquoi et comment enregistrer l’écriture ? Comment représenter/visualiser le processus d’écriture ? Comment mieux utiliser ces outils ?
- Les méthodes déjà mises en place pour l’enseignement de l’écriture. Cet axe est lié aux questions suivantes : Comment utiliser les représentations du processus scriptural dans l’enseignement de l’écriture ? Quelles informations peuvent être extraites des représentations du processus en salle de cours ? Comment ces méthodes déjà en place pourraient-elles profiter des outils disponibles et les nourrir ?
- L’éthique, avec les questions : Quels sont les droits de ceux qui participent aux enregistrements ? Comment rédiger un formulaire de consentement dans le respect des données personnelles ? L'écriture enregistrée nécessite-t-elle un formulaire spécifique ?
Modalites de soumission et calendrier:
Les propositions de communication (une à deux pages maximum, comportant le titre de la communication, un résumé, quelques références bibliographiques) sont à envoyer avant le 15 septembre 2025 en format Word ou PDF aux adresses suivantes :
[email protected]
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Page Updated: 22-Aug-2025
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